Mariage intérieur au Népal
Octobre 2019
Quand j’ai dit autour de moi que je partais au Népal, plusieurs personnes m’ont dit « mon voyage au Népal a changé ma vie, quand je suis rentrée j’ai quitté l’entreprise sans laquelle j’étais depuis des années et j’ai enfin fait ce qui me plaisait ». Une amie m’a même dit « le Népal m’a transformé, j’y ai rencontré l’homme de ma vie ».
Etant en crise existentielle au travail et célibataire une partie de moi avait très envie de croire que pour moi aussi ce serait LE voyage de ma vie. Pourtant, j’ai décidé en mon âme et conscience de partir sans attente et de suivre la sage recommandation de ma grand-mère « tu sais ma chérie, c’est quand tu y penseras le moins que tu rencontreras quelqu’un ». Merci Mamie, je t’ai écouté.
Partie sans attente donc je suis rentrée riche de 2 cadeaux incommensurables :
- Je n’ai pas rencontré l’homme de ma vie mais j’ai rencontré un homme à travers qui je suis tombée amoureuse de moi
- Je n’ai pas quitté mon entreprise en rentrant mais en me reconnectant à ma vraie nature j’ai pu prendre du recul et proposer le changement dont j’avais besoin
Le 11 octobre 2019 me voilà donc partie pour trois semaines au Népal. Perdue, en quête de place, en crise d’impact et au bout du rouleau, ce voyage arrivait à point nommé. Dans le groupe de 15 avec qui je partais je ne connaissais qu’une personne qui se trouvait être une des 2 co-encadrante du groupe. Merci Françoise, mon amie, ma grande-sœur spirituelle de m’avoir embarqué dans cette aventure.
A mon arrivée, Francoise m’annonce que nous serons finalement 16, un participant de toute dernière minute – Fadi – s’étant invité dans le groupe. Je m’entends lui répondre à ce moment-là « Ah ok, chouette un nombre paire ».
Les premiers jours à Katmandou permettent une acclimatation au chaos doux et bienveillant Népalais. Je suis tout même heureuse de quitter la ville et commencer les 10 jours de périple dans le Dolpo, une contrée perdue au fin fond du Népal à des heures et des heures de bus. Un jour et demi très exactement de Pokhara. J’adooore les voyages en bus. Accompagnée de mes musiques préférées j’alterne entre lire et lever les yeux pour me perdre dans les paysages qui défilent. Une bulle de paix et d’harmonie pendant laquelle j’ai l’impression que le temps s’arrête.
Ce voyage en bus fut tout autre. Fadi est venu s’assoir à côté de moi, ce à quoi je ne m’attendais pas du tout. Nous avons passé tout le trajet à se rencontrer, à se découvrir, à se dévoiler par les mots en nous racontant. Très vite on rentre dans des épisodes profonds, intimes de nos vies. On partage également nos passions, nos ressources que ce soit des musiques, des citations, des photos, des vidéos… On rit beaucoup, c’est vivant, c’est fluide, c’est évident, c’est bon. Ce trajet marque la tonalité des 10 jours à venir au cours desquels nous nous sommes rapprochés chaque jour un peu plus.
Fadi habitant au Liban, moi à Paris je me suis jetée dans cette relation d’amitié sans aucune projection ni aucune attente. En sa présence j’étais moi. Spontanée, pleine d’énergie, vivante, dans l’instant. J’accueillais toutes mes émotions sans filtre : riant quand j’avais envie d’extérioriser ma joie (soit beaucoup!), pleurant quand j’avais besoin de nettoyer une blessure profonde (beaucoup aussi!), hurlant ma rage quand j’avais besoin de dégager une douleur insoutenable. Je me suis sentie accueillie comme j’étais : authentique, nature, sans artifice. Il faut dire que dormir sous tente avec une douche tous les 2 jours ça aide à revenir à l’essentiel et à être naturelle !
Nous avons tout d’abord marché souvent ensemble, puis beaucoup et enfin tout le temps si bien qu’on nous a appelé les « loving birds ». Car oui, inévitablement au fil des jours je me suis attachée un peu, beaucoup, passionnément jusqu’à ce que la partie de moi qui avait très envie de croire que moi aussi je rencontrerai l’homme de ma vie au Népal, y croie. La séparation fut très difficile. Lui au Liban en pleine révolution, moi à Paris nous avons maintenu le lien quelques semaines, puis la distance a agi et la vie a repris son court. D’abord triste et en manque j’ai fini par ranger cette belle idylle dans le rayon « romance » de ma mémoire avec en toile de fond une pointe d’aigreur « pourquoi pas moi ? ».
Quelques mois passent et fin décembre je pars avec mon autre amie de cœur marcher aux Canaris. Et pendant une randonnée, entourée d’une nature magnifique, je reçois un message : « Charlotte, en tombant amoureuse de Fadi en fait c’est de toi que tu es tombée amoureuse ». Les larmes montent à nouveau en écrivant ces mots. Je comprends alors que c’est le cadeau que m’a offert le Népal : tomber amoureuse de moi, de mon moi authentique, de mon moi nature, de mon moi ouvert à l’imprévu, de mon moi qui se laisse traverser par la vie. Le soir du nouvel an, alors que cela fait au moins un mois que ne n’avions pas échangé un mot, je partage à Fadi ma révélation et lui exprime la profonde gratitude que j’ai pour lui. Je le remercie d’avoir été le miroir dont j’avais besoin pour me reconnecter à la part de moi qui me fait rire, qui m’accepte comme je suis, qui me souffle des conseils sincères, qui me prend dans ses bras, qui me tient la main, qui écoute mes histoires et mes chagrins.
Pour finir, n’ayant pas ressenti l’urgence de quitter mon entreprise pendant mon voyage, je retrouvais le dossier « situation compliquée au travail » à mon retour en France. J’ai pris du temps pour faire le point, prendre du recul et regarder la situation avec mes nouveaux yeux et mon cœur empuissancé. J’ai ainsi pu voir de nouvelles possibilités et proposer à mon directeur une option acceptable pour moi pour les 12 prochains mois.
Je n’ai ni rencontré l’homme de ma vie, ni décidé de plaquer mon boulot pendant mon voyage au Népal toutefois ce voyage m’a bel et bien transformé moi aussi.