Ce matin je me suis réveillée avec ces mots « je saigne, je suis femme ».

Il se trouve que j’ai mes lunes depuis quelques jours. J’ai pris ce message comme une invitation à écrire « mon histoire de lunes ».  Sujet que j’ai longtemps ignoré et sur lequel je n’ai jamais écrit. La voici.

Cette histoire commence au collège. Une à une, mes amies avaient leurs premières règles. Elles devenaient importantes. Elles se plaignaient de la douleur, des sautes d’humeur, des tâches sur leurs vêtements… mais derrière ce discours plaintif j’entendais la fierté de ce changement de statut. La fierté de devenir une femme.  « Ça » devenait un sujet très présent dans nos discussions et moi j’attendais avec impatience que « ça » arrive. J’attendais que ça arrive et en même temps j’avais plein de questions. Je connaissais les réponses biologiques et physiologiques mais il me manquait les réponses plus émotionnelles et psychologiques. Et je n’avais pas le courage d’en parler avec ma mère.

A la fin de la 3ème « ça » n’était toujours pas arrivé. J’étais une des seules à ne toujours pas avoir eu mes règles. Je me sentais « en retard ».

J’ai eu mes premières lunes pendant les grandes vacances alors que j’étais chez mes grands-parents paternels dans les Pyrénées Orientales. Je me rappelle très bien de la scène. Je me rappelle avoir tout de suite ressenti un grand soulagement qui disait « je suis normale ». Puis un sourire s’est dessiné sur mon visage et j’ai ressenti de la joie qui chantait « je deviens une femme ». Je me rappelle aussi m’être dit « j’aurai aimé que ma mère soit là ».

J’ai dit à ma grand-mère ce qui m’arrivait et nous sommes allées acheter des serviettes hygiéniques. Je ne me rappelle pas avoir eu de discussion de femme à femme avec elle. Je n’ai pas dû oser lui poser de questions. Elle n’a pas dû oser aborder le sujet. En y repensant j’aurai beaucoup aimé avoir pu échanger avec ma grand-mère sur l’arrivée de ses premières règles et son rapport à la féminité.

Pendant presque 10 ans j’ai eu un rapport très lointain avec mon cycle menstruel. Passé le soulagement d’être comme tout le monde et la joie d’être devenue une femme je trouvais qu’avoir mes règles tous les mois était plutôt pénible. Même si je n’avais pas de douleurs particulières, saigner tous les mois n’était pas franchement agréable et surtout source de stress. Le stress qu’on le voit, le stress permanent de me tacher. Bref, je subissais cette loi de la nature féminine et ne voyais pas du tout la beauté et la magie du cycle féminin. D’ailleurs je me rappelle avoir souvent utilisé l’expression « je suis indisposée » pour en parler qui en dit long sur mon ressenti.

Et puis une rupture sentimentale a provoqué chez moi une aménorrhée de 5 ans. Pendant 5 ans j’ai vécu sans règles. Pendant 5 ans j’ai vécu coupée de mon cycle. Pendant 5 ans j’ai réinvesti la case « pas normale ». J’ai eu de nombreux RDV avec plusieurs gynécologues. J’ai enduré de nombreux examens médicaux de toute sorte. Et puis au bout d’une année le diagnostic le plus probable est tombé : je m’étais mise en dormance. Le traumatisme de ma rupture m’avait coupé l’envie d’être une femme. J’étais physiologiquement redevenue une petite fille.

J’étais rassurée et je n’avais rien d’autre à faire que d’attendre que mon hypophyse se réveille. J’ai donc profité à fond de ces années sans règles et je me suis promis d’être la femme la plus heureuse du monde à leur retour et tous les mois qui suivront.

Mes lunes sont revenues à la fin de l’été 2012. Le déclencheur ? Le départ de mon frère en Australie. Il m’a annoncé son départ en mai de la même année et ça m’a profondément secouée. J’ai beaucoup beaucoup beaucoup pleuré pendant les mois avant son départ. Il est officiellement parti fin août et quelques jours après son départ mes lunes faisaient leur réapparition. Le traumatisme du départ de mon frère m’avait sortie de ma dormance. Un peu comme Obélix j’avais eu besoin d’un deuxième coup de menhir sur la tête pour redevenir normale !

Depuis ce jour, je tiens ma promesse. Je ressens beaucoup de joie et de gratitude à chaque fois que j’ai mes lunes… même si elles ne sont pas régulières et me font constamment de petites surprises !

Enfin, depuis 2 ans je me suis connectée au cycle de la lune. Je pose mes intentions à la nouvelle lune, le cycle qui commence, porteur de « tout est possible ». Puis à la pleine lune je récolte les fruits déjà murs ; j’accepte les projets qui ont encore besoin d’avancer pour lesquels je remettrais de l’énergie au prochain cycle ; je re-questionne les projets qui n’ont pas bougés en me demandant s’ils sont toujours importants pour moi… et j’essayer de me foutre la paix et d’être douce avec moi.

Aujourd’hui je me sens pleinement femme et en paix avec mon histoire de lunes au point de pouvoir vous la partager.

Et vous quelle est votre histoire ?

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